John Mayall est né le 29 novembre 1933 à Macclesfield, un petit village d’Angleterre près de la grande ville industrielle de Manchester, bien loin, à l’époque de la culture du blues noir que nous connaissons aujourd’hui.
Aîné des trois enfants d’une modeste famille d’ouvriers, ce frêle garçon au physique typiquement anglais a grandi dans les remous de la 2ème guerre mondiale en écoutant la vaste collection de disques de jazz de son père guitariste et s’est senti attiré par le blues.
Fortement influencé par de grands musiciens de blues comme Leadbelly, Albert Ammons, Pinetop Smith ou Eddie Lang, dès l’âge de 13 ans, il apprend seul la musique et développe son propre style en jouant sur le piano d’un voisin, des guitares prêtées et des harmonicas d’occasion.
Cependant, le premier contact de John Mayall avec la célébrité n’a pas été pour sa musique. Adolescent, il a décidé de quitter la maison et, faisant, manifestant l’excentricité et l’inventivité qui le caractérisent, il a emménagé dans une cabane dans les arbres. Cela lui a valu d’attirer l’attention des journaux locaux, d’autant plus que, de retour de son service militaire en Corée, il s’y installe à nouveau avec Pamela, sa première épouse.
D’une formation dans une école d’art à trois ans dans l’armée britannique en Corée, en passant par une carrière réussie dans le graphisme, sa passion pour le blues est passée au second plan jusqu’à l’âge de 30 ans. Depuis l’âge de 23 ans et son retour de Corée, John se produisait à temps partiel avec des petits groupes tels que The Powerhouse Four et The Blues Syndicate. C’est à cette époque que fut créé Blues Incorporated d’Alexis Korner, un des groupes pionniers du boom du blues britannique de la fin des 60’s.
Alexis n’a pas tardé à encourager John à quitter Manchester pour Londres où il a rapidement obtenu suffisamment de travail en club pour pouvoir devenir professionnel et créer son propre groupe : John Mayall’s Bluesbreakers. Après quelques années et de nombreux changements de musiciens, il rencontre celui qu’il qualifiera d’âme-soeur, Eric Clapton, qui venait de quitter les Yardbirds pour jouer du blues. Cette rencontre de deux phénomènes du blues a culminé avec le premier album à succès des Bluesbreakers et a fait de John Mayall une légende du blues britannique.
Après le départ de Clapton et du bassiste-chanteur Jack Bruce partis fonder Cream en compagnie du batteur Ginger Baker, une ribambelle de grands musiciens sont venus se faire un nom sous la conduite de John Mayall reconnu alors comme un grand découvreur de talents. Et tous ont ensuite fait une carrière exceptionnelle : Peter Green, John McVie et Mick Fleetwood qui ont fondé Fleetwood Mac, Andy Fraser fondateur de Free ou encore Mick Taylor qui a rejoint les Rolling Stones.
Comme l’a dit Eric Clapton :
« John Mayall était en réalité directeur d’une grande école de musique.«
En 1969, alors que sa popularité explose aux États-Unis, John fait sensation avec la sortie d’un album live, devenu disque d’or, sans batteur intitulé The Turning Point, dont sa chanson Room To Move est destinée à devenir un classique du rock. Attiré par le climat et la culture de la côte ouest des Etats-Unis, John a ensuite quitté l’Angleterre pour s’installer définitivement dans Laurel Canyon à Los Angeles et a commencé à former des groupes avec des musiciens américains.
Tout au long des années 70, John est devenu encore plus respecté pour ses nombreuses innovations jazz/rock/blues mettant en vedette des artistes aussi remarquables que Blue Mitchell, Red Holloway, Larry Taylor et Harvey Mandel. Il a également accompagné les grands du blues US John Lee Hooker, T-Bone Walker et Sonny Boy Williamson lors de leurs premières tournées de clubs anglais.
L’année 1979 s’est avérée être une année de transition, faite de hauts et de bas, pour John Mayall, tant sur le plan personnel que professionnel. L’attrait pour la musique blues dans le public était en diminution et Mayall a eu du mal à maintenir à flot sa carrière aussi bien sur scène qu’en studio. Sur le plan personnel, cependant, il a commencé une relation de plus de 20 ans avec son épouse actuelle Maggie (Parker, née Mulacek), une chanteuse/compositrice de Chicago qui avait été embauchée par le groupe d’Harvey Mandel en remplacement de… Mayall. Enfin, le pire lui est arrivé lorsqu’il a vu sa maison de Laurel Canyon bruler et faire disparaître ses journaux scrupuleusement tenus, les journaux de son père, ses principaux enregistrements, ses vastes collections de livres et de magazines, ses œuvres d’art et bien plus encore.
Une période compliquée dont John Mayall a tenu à sortir par le haut.
Motivé par la nostalgie et les bons souvenirs, John (en compagnie de Mick Taylor et John McVie) décide en 1982 de reformer les Bluesbreakers pour quelques tournées et un film des concerts intitulé Blues Alive, qui mettait en vedette Albert King, Buddy Guy, Junior Wells, Etta James et Sippie Wallace et d’autres. Une toute nouvelle génération de fans pourrait avoir un avant-goût de ce qu’était cette musique, lors de l’explosion du British Blues.
Alors que Mick Taylor et John McVie avaient repris le cours de leurs carrières respectives, la réaction du public avait convaincu Mayall qu’il devait revenir à ses idées de départ. Il entreprit alors de sélectionner des musiciens de Los Angeles pour créer une nouvelle incarnation des Bluesbreakers. Officiellement lancé en 1984, il comprenait de futures stars à part entière, les guitaristes Coco Montoya et Walter Trout ainsi que le batteur Joe Yuele, qui est, encore aujourd’hui, le gardien du tempo de John.
Avec un public de plus en plus nombreux chaque année, les années 90 ont démarré avec la publication de plusieurs albums de John Mayall qui ont défini un nouveau standard dans le blues moderne : « Behind The Iron Curtain« , « Chicago Line« , « A Sense of Place » et « Wake Up Call » nominé aux Grammy Awards. Ces albums voyaient les noms prestigieux de Buddy Guy, Mavis Staples, Albert Collins et Mick Taylor dans le personnel !
En 1993, le guitariste texan Buddy Whittington rejoint les Bluesbreakers et, au fil des années, a imposé son énergie et ses idées originales. Dès le premier album auquel il a participé, Spinning Coin, il a démontré qu’il était tout à fait digne de prendre la suite de ses illustres prédécesseurs. Ensuite, ils ont produits deux nouveaux albums : Blues For the Lost Days et Padlock On The Blues, (ce dernier, co-produit par John et sa femme Maggie, contenait la participation de la légende John Lee Hooker, qui a été l’un des plus proches amis de Mayall à la fin des 60’s).
Ces albums ont tous été acclamés par la critique et le public et sont l’mage de la maîtrise du blues de Mayall et son importance dans la musique contemporaine. De plus, Mayall a sorti trois CD sur son propre label privé, Private Stash Records. Il s’agit de Time Capsule (contenant des enregistrements en public datant de 1957 à 1962 – qui n’est plus disponible), UK Tour 2K (enregistrements live de la tournée britannique Bluesbreakers 2000) et une sélection de performances solo de John intitulée Boogie Woogie Man.
Le XXIème siècle s’est avéré tout aussi productif !
2001 : Sur Along For The Ride, Mayall a retrouvé un certain nombre de ses anciens amis, dont, pour la première fois depuis 30 ans, Peter Green, Mick Fleetwood, John McVie et Mick Taylor, mais également Billy Gibbons et Billy Ethridge de ZZ Top, Jonny Lang, Steve Miller, Billy Preston, Steve Cropper, Otis Rush, Gary Moore, Jeff Healey, Reese Wynans du groupe de Steve Ray Vaughan et Shannon Curfman pour une incroyable démonstration de la puissance du blues.
Produit par David Z., cet album présentait des duos de Mayall avec le grand soul Billy Preston, la légende du blues Otis Rush et la jeune sensation adolescente blues/rock Shannon Curfman.
2002 : le 27 août, Mayall et les Bluesbreakers, toujours produits par David Z., ont enregistré l’album STORIES qui s’est retrouvé, dès sa sortie, en tête du classement des albums blues, album qu’ils ont prolongé par une tournée mondiale.
2003 : John Mayall a juste 70 ans. Après une énorme tournée John Mayall et les Bluesbreakers ont célébré cet anniversaire à Liverpool avec un concert au profit de l’UNICEF avec des invités comme Eric Clapton, Mick Taylor et Chris Barber. Ce concert a été filmé, enregistré et publié sous la forme d’un DVD et d’un double CD en décembre 2003. Pour conclure cette année, la BBC a diffusé un long documentaire sur la vie et la carrière de John Mayall intitulé The Godfather of British Blues (le Parrain du blues britannique). Ce film a depuis été publié par Eagle Records sur un DVD intitulé Godfather/The Turning Point qui contient également un documentaire datant de 1969.
2004 : Private Stash publie un DVD intitulé Cookie’ Down Under avec un concert enregistré en Australie et John sortit une compilation de ses boogie-woogie préférés sur un CD chez Document Records qui était en vente dans un coffret intitulé Essentially John Mayall et qui contenait également 4 CD de chez Eagle. Cette élégante pièce de collection sera également complétée par un disque bonus compilant des prestations privées issues des archives de Mayall où on retrouve les guitaristes Eric Clapton, Peter Green, Mick Taylor, Walter Trout, Coco Montoya et Buddy Whittington.
2005 : sortie de l’album Road Dogs, le 55ème de John, entièrement produit par les Bluesbreakers et pour lequel John a écrit 13 des 15 titres (les deux autres ont été composés par Buddy, Joe et Hank). Les Bluesbreakers ont également sorti In the Palace of the King, un CD hommage à leur idole de toujours, Freddie King.
2009 : Mayall forme une nouvelle version des Bluesbreakers avec Rocky Athas à la guitare, Greg Rzab à la basse et Jay Davenport à la batterie.
Depuis 2018, Carolyn Wonderland remplace Rocky Athas dans un groupe qui se produisait encore en 2022.
Agé aujourd’hui de 90 ans, élevé au rang d’Officier de l’Ordre de l’Empire Britannique par la Reine en 2006, père de 6 enfants et 6 fois grand-père, John Mayall a toujours en tête de faire vivre le blues pour quelques années encore.
Et comme John Mayall et ses camarades n’ont jamais été meilleurs que sur scène, retrouvons les ici dans Room to Move au Capitol Theatre de PAssaic (New Jersey) le 18 juin 1982. On y retrouve :
John Mayall – chant, guitare, piano, harmonica, Mick Taylor – guitare solo, John McVie – basse et Colin Allen – batterie (les invités cités dans la vidéo n’apparaissent pas sur ce titre).